Crissements

 

Je suis le petit caillou qui s'faufile et qui glisse, et qui crisse, et qui crisse, contre les bordures de ton cerveau borné de con inconscient.

Ta conscience se transforme et se déforme à volonté, elle vole de la bonté à la méchanceté sans se soucier des petits cailloux qu'elle tente d'écraser sans jamais réussir à les briser.

Je suis le petit caillou qui enraye ton engrenage et qui l'empêche de tourner, et qui coince, et qui coince la mécanique de ton cerveau diabolique aux contours statiques. Ce cerveau a arrêté depuis longtemps de s'ouvrir et s'agrandir, il est pris dans la dynamique inverse qui verse, qui verse du côté du rapetissement et du ressassement d'images usées et de logiques désabusées.

Je suis le petit caillou qui torture tes gros pieds dans les chaussures que tu viens d'acheter avec le chèque que t'as gagné, que t'as gagné à continuer à te rapetisser, à te retourner, à te rengorger. Le petit caillou qui ricane, qui ricane, hé, hé, quand tu commences à réaliser à quel point ton horizon est limité, à quel point tes idées sont arriérées et que ces escrocs plébiscités par toi et tes semblables nous ont volé nos libertés et les ont jetées sous nous yeux sous leurs pieds.

Je suis le petit caillou que les cons de ton espèce croient pouvoir jeter sur le bord de la route et oublier aussi vite qu'ils l'ont mis de côté. Mais je m'enfonce, je me cale, et je m'installe, je m'installe dans leurs cœurs éplorés et dans leurs vies gâchées quand viennent la déroute, les fausses routes, le manque d'écoute.

Tu ne sais pas que je suis là, mais tu entends les crissements, tu ressens les coincements, tu te vexes des ricanements. Comme le chauffeur ne voit jamais l'éclat de verre qui fait crever son pneu, tu n'as même pas remarqué le petit caillou qui te fait des bleus. Je te hante, je te hais, je t'horripile, je t'horrifie. Je te provoque et tu te bloques.